Une machine comme moi de Ian McEwan
Gallimard 2020, Du Monde Entier, 386 p.
Traduit de l’anglais par France Camus-Pichon
Un nouveau roman de Ian McEwan, c’est irrésistible en soi pour qui a déjà eu l’occasion d’en lire un, quel qu’il soit; non pas que TOUS les romans de Ian McEwan soient parfaits, ça n’existe pas et même, on peut ne pas apprécier plus que ça certains de ses romans. Ce qu’on ne peut prétendre, en revanche, c’est qu’on s’y ennuie ou qu’ils soient bêtes. Tous ne nous touchent pas de la même façon mais tous sont pétris d’intelligence et disent quelque chose de leur époque et de leurs contemporains.
« Il tenait à Miranda de la même façon qu’un lave-vaisselle tient à ses assiettes. »
Pour aborder le thème de l’intelligence artificielle, Ian McEwan développe un vrai roman de Science-Fiction, plaçant d’entrée de jeu une uchronie : nous sommes au début des années 80 et ni Alan Turing ni les Beatles n’ont raccroché les gants. Récemment mis sur le marché, mais encore très onéreux, deux modèles d’intelligence artificielle sont en test, douze Adam et treize Ève.
« On trouve un certain répit dans la sensualité d’un lit rien qu’à soi, pendant quelques temps du moins, jusqu’à ce que le fait de dormir seul acquière sa propre tristesse muette. »
Charlie aurait aimé acquérir une Ève mais c’est un Adam qu’il ramène à la maison, qu’il entreprend de configurer avec sa voisine du dessus, Miranda, qui deviendra bien vite son amoureuse. Ensemble, ils vont faire l’expérience de cette parentalité d’un nouveau genre…
« Je m’approchai, comme avant moi des millions de gens s’étaient approchés d’une personnalité dans un lieu public, avec cette humilité apparente qui masque le sentiment de légitimité conféré par une admiration sincère. »
C’est un roman que j’ai trouvé étrange car il m’a semblé à plusieurs endroits renoncer à une bifurcation un temps envisagée, ou c’est peut-être moi qui me suis sentie désarçonnée par des formulations un peu absconses. Charlie est un poil ennuyeux, mou, je ne l’ai pas toujours très bien suivi dans ses considérations politiques, d’ailleurs je me suis un peu perdue dans les modifications sociétales par rapport à la réalité, et surtout ce n’était pas ce que je souhaitais lire. Beaucoup de péripéties annexes au thème central, celui qui m’intéressait le plus, qui n’en demeure pas moins bien traité. Et puis évidemment ces petites perles disséminées un peu partout, des pensées comme ça qui font mouche. On ne sait toujours pas si les robots rêvent de moutons électriques mais leur tristesse en revanche nous devient palpable, et on referme ce livre avec des dizaines de sujets à approfondir.
(*Kipling)
27 janvier 2020 at 07:52
Les Beatles dans les années 80? Je vote pour! ^_^
J'aimeJ'aime
27 janvier 2020 at 08:01
🙂
J'aimeJ'aime
29 janvier 2020 at 03:32
Je lis toujours McEwan, même si, comme tu le dis, les romans ne sont aps tous parfaits. Celui-ci a fait son chemin jusque chez moi.
J'aimeAimé par 1 personne
29 janvier 2020 at 17:18
Je suis toujours tentée par un McEwan, et celui-ci ne fait pas exception, pourtant ses derniers livres m’ont souvent déçue.
J'aimeAimé par 1 personne
31 janvier 2020 at 15:01
Je n’ai lu que « Expiation », il y a des années … lequel me conseillerais-tu ?
J'aimeJ'aime
31 janvier 2020 at 15:08
Sans hésiter « Solaire » (Gallimard 2011, 389 pages, traduit de l’anglais par France Camus-Pichon) C’est un de ces romans que l’on parvient à grand peine à reposer, qui n’offre pas d’endroit où le laisser : tout s’enchaîne, en une sorte de bavardage qui paraît impromptu (grâce à une construction solide) et surtout, agréable et facile.
Traitant pourtant de sujets graves et sérieux, il gambade avec beaucoup d’humour et de subtilité, et nous entraîne dans neuf ans de la vie de Michael Beard, physicien. Etre intelligent exonère-t-il de l’attention aux autres ? Ce personnage fascine et on ne parvient pas, malgré une succession d’éléments à charge, à vraiment le détester. Il est incapable de se contraindre, en aucune manière, et ne s’illusionne pas sur lui-même. Mauvais mari (cinq fois), mauvais père, chercheur paresseux, gourmand, très moyennement honnête, grandement alcoolisé à la moindre occasion, paresseux et lâche, oui, mais aussi brillant.
Ian McEwan ne sollicite jamais l’indulgence du lecteur, mais l’obtient de façon pleine et entière.
Mention spéciale à la longue scène du paquet de ships.
J'aimeJ'aime
2 février 2020 at 10:49
Oserai-je l’avouer ? Je ne suis pas une inconditionnelle de McEwan et je n’avais pas aimé « Solaire » (je n’avais eu aucun mal à détester le personnage principal contrairement à toi !). Mais je sais que c’est un auteur important.
J'aimeJ'aime
2 février 2020 at 11:29
Il fait partie de ces rares auteurs qui nous divisent 🙂
J'aimeJ'aime