« Je suis prise dans la routine de l’exercice physique. Chaque seconde, mes faits et gestes sont dictés. Impossible de réfléchir. Et puis réfléchir, c’est déjà désobéir. »
Féminine – Emilie Guillaumin
Fayard, 2016, 400 pages
Emma Linarès éprouve, de tous temps, une fascination pour l’armée. Ce qu’elle raconte de son enfance l’explique dans une certaine mesure, mais la façon dont elle pense à une carrière de militaire va au-delà de l’approche psychologisante de sa famille; elle se sent appelée à un grand destin, et elle puise du réconfort dans l’idée de fraternité : « Ma singularité m’inquiétait. Etre soldat, numéro de matricule parmi tant d’autres, n’être que l’un des rouages d’une mécanique puissante, était une idée séduisante. » Elle a vécu chez ses parents jusqu’à vingt-sept ans, elle a fait de bonnes études, elle travaille comme journaliste radio; et cette vie l’asphyxie. Un jour, elle se lance. Elle pousse la porte de l’Armée de Terre. Et elle raconte…
C’est un premier roman et il est vraisemblablement largement autobiographique. Il est aussi profondément intéressant, en dépit (ou peut-être même grâce) à ses quelques fragilités (un chouïa de redites, un moment un peu flou vers le milieu). Il raconte le parcours d’une jeune femme à la recherche d’elle-même, et sait parfaitement faire ressentir l’ambivalence de la narratrice. En être et s’en libérer (militaire), apprécier et en voir le ridicule (les marches au pas, les chants surtout), juger mais accepter totalement (les collègues) – et vraiment accepter : ses portraits sont d’une grande tendresse, sans pourtant rien édulcorer.
« Êtes-vous rustique ? » lui avait demandé le premier recruteur :
« Je ne savais pas encore que ce mot, c’est la base pour tout soldat. La rusticité, c’est la capacité de vivre à la dure sans se plaindre, d’encaisser le pire sans moufter. La rusticité ultime, c’est non seulement de ne pas se lamenter, mais d’aimer ça, ce mélange tourbeux de froid, d’inconfort, de risque. »
Elle avait répondu oui – et c’était vrai, en un sens (elle pensait mentir).
L’année et demi qu’elle aura passé au sein de La Grande Muette lui aura appris les limites de sa rusticité – qui ne sont pas où elle l’aurait pensé.
(« Féminine », c’est ainsi que sont nommées les soldates dans l’armée. Il y a les hommes, et les féminines. #WTF)
13 septembre 2016 at 06:57
Étonnant ça mais intéressant aussi 🙂 à repérer au détour de la bibliothèque 🙂
J'aimeAimé par 1 personne
13 septembre 2016 at 09:09
Ma vie fascinante : gamine, j’ai aidé des adultes à trier les lentilles (ils étaient payés -peu sans doute- pour ça)
J'aimeJ'aime
13 septembre 2016 at 10:51
🙂
J'aimeJ'aime
13 septembre 2016 at 18:15
Je n’ai jamais rien lu sur le sujet, pourquoi pas, vraiment !
J'aimeAimé par 1 personne
13 septembre 2016 at 20:53
pourquoi pas , J’ai passé 17 ans dans la Grande Muette.
J'aimeJ'aime
14 septembre 2016 at 06:26
17 ans ! Ca devrait te rappeler quelques souvenirs, en effet 🙂
J'aimeAimé par 1 personne