« Pour des raisons que nous verrons plus tard, je n’étais pas malheureuse, mais j’étais pauvre.«
Quand le diable sortit de la salle de bain – Sophie Divry
(Roman improvisé, interruptif et pas sérieux <== sous-titre)
Les éditions Noir sur Blanc, collection NOTABL/LIA, 2015, 320 pages
« Ce roman raconte une histoire : la recherche d’emploi d’une jeune précaire. Sans prétendre dresser un tableau objectif du chômage, je voulais que ce livre reflète quelque chose de nos misères contemporaines, quelque chose d’à la fois prosaïque et urgent, du ressort de la nécessité économique. »
Sophie Divry
Sophie Divry n’écrit jamais deux fois le même genre de roman et c’est heureux : « La côte 400 » m’avait assommée d’ennui et « La condition pavillonnaire » fait l’effet d’un suppositoire de taille 3XL. Pas rancunière, toujours curieuse et facilement alléchée par une promesse de bonne rigolade, j’ai jeté un oeil dans cette salle de bain et bonne pioche ! Maintenant, qu’en dire ? Il n’y a pas deux pages identiques dans ce roman et la richesse de ce qu’il contient est indécente. Sophie Divry elle-même, craintive ou bonne fille, je ne sais, fournit à son lecteur et éventuel chroniqueur toute la matière : ses intentions, ses influences, ses références, ses citations (cachées ou non), le vocabulaire employable pour qualifier son style, ses trouvailles, tout. Il n’y a plus qu’à lire ! Ce que j’ait fait en me gondolant tout du long, à en sautiller de joie. J’ai adoré les personnages parlant l’un en épithètes antédéposées, l’autre en pléonasmes, moins les pavés de listes-voulant-dire-la-même-chose, et accorde une mention au tout premier service effectué en tant qu’extra dans un bouchon lyonnais : j’ai rarement vu mots aussi justes pour décrire ce phénomène très particulier qu’est un beau service en salle. Inventif, tenu et très réjouissant, ce roman m’a plu-plu-plu et je le recommande !
« Car ce long animal mou, cruel, collant, dégueulasse, que j’appelle par défaut la nécessité, la dèche, la débine, la mistoufle, la misère, la mouise, la scoumoune aux grands crocs; cette bête a pour premier effet, avant même toutes les conséquences physiques, vestimentaires ou alimentaires, de vous claquemurer dans vos soucis. C’est la règle du mini. C’est le règne du petit.«
« Il me manquait toujours des mots. Il n’y a pas de mot pour dire « du samedi », par exemple, alors qu’il existe un adjectif pour dire « du dimanche », dominical. Le repas dominical, tout le monde a compris; mais comment dire la piscine du samedi ou la partie de jambes en l’air du samedi ? Il n’y a pas de verbe pour dire qu’on a enfilé son vêtement à l’envers. On ne peut pas marquer une différence entre être mouillé par la pluie et être mouillé par la neige. Il manque au restaurateur un adjectif pour qualifier une table-où-on-ne-peut-dresser-que-deux-couverts; en l’entendant, les amoureux se souriraient davantage. Il n’y a pas d’expression désignant l’occupation qui consiste à discuter entre amis des films qu’on n’a pas vus. Il serait temps d’inventer quelque chose pour remplacer l’expression lénifiante « j’ai commandé sur Internet ». J’ai besoin d’un verbe pour dire « jouer faux », il serait associé à l’apprentissage du violon. Il y a d’autres mots qui manquent dans la langue française, merci d’envoyer un inventaire de ces lacunes à l’adresse <lesmotsquimanquent@gmail.com>1, je ferai part des meilleures dans mon prochain bouquin. Attention, je ne demande pas d’inventer des mots, je demande de regarder là où il y a des trous dans la langue. Et sur ces entrefaites, comme on dit, je m’endormis. 1. Si un lecteur ou une lectrice veut m’envoyer une lettre d’amour, il ou elle peut utiliser également cette adresse. Pour les lettres d’insultes, écrire plutôt à : edf@service-contentieux.fr>«
*Zeugma envoyé à Jérôme Garcin. Sera-t-il cité à l’antenne ?…^^ : OUI ! Emission du 13 septembre 2015.
28 août 2015 at 07:12
Dévoré chez le coiffeur, j’avais du mal à réprimer mon enthousiasme devant tant de liberté d’invention mais aussi de justesse dans les descriptions ! Quant à la rencontre surprenante au Pôle emploi, j’ai failli éclater de rire ! Du pur bonheur !
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15 octobre 2015 at 08:25
Un coiffeur qui mérite qu’on entre dans son salon, au moins pour les lectures!
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28 août 2015 at 08:45
Je n’ai pas lu, ni même été attirée par ses deux premiers romans (à te lire, tant mieux) mais j’ai lu quelques pages de celui-ci et il m’a paru réjouissant. Je n’ai donc pas hésité quand je l’ai trouvé d’occasion : il m’attend !
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28 août 2015 at 08:49
Je n’ai pas lu les précédents, mais celui-ci m’inspire bien. Je retiens surtout que l’on rit beaucoup.
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28 août 2015 at 08:53
j’ai envie de sourire moi aussi , un peu de gaieté dans un cile breton qui se croit en automne me fera le plus grand bien.
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28 août 2015 at 10:15
Je note je note ! Voilà qui me changerait agréablement de mes lectures actuelles assez sombres.
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28 août 2015 at 10:33
Pfff, je n’ai pas lu les deux premiers, et me voilà bien tentée (superbe passage)
Me voilà embêtée, je sais qu’il existe un bouquin où l’auteur fait une liste de mots qui n’existent pas mais qui devraient, vu à la bibli il y a longtemps… C’est lui qui invente ces mots. Je sens que ça pourrait te plaire.
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28 août 2015 at 12:27
Au vu de ton avis et des citations…ce livre me fait très, très envie.
Par contre, mention spéciale pour l’effet suppositoire de taille 3XL. J’adore.
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28 août 2015 at 22:58
Ouh là, là, où est ma liseuse que je clique sur ACHETER de suite ?! :-))))
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29 août 2015 at 08:50
Gagné: je le veux, je le veux, je le veux… Qu’elle citation, j’adore… (en plus tous ces mots manquent VRAIMENT d’ailleurs j’ai du inventer quelques bizarreries parfois pour compenser un manque mais on ne peut pas TOUT inventer non plus, ça finirait par se voir 🙂
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29 août 2015 at 17:48
Oh je sens que ça va me plaire !! 😉 Merci Cuné !
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30 août 2015 at 11:12
J’ai débuté ma lecture de l’auteure avec ce roman que je trouve très réussi, par contre, La condition pavillonnaire, je ne suis pas sûr de le lire, je ne suis pas adepte du suppo, alors en taile 3XL….
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30 août 2015 at 11:20
« La condition pavillonnaire » a eu un gros succès tu sais, je ne suis pas majoritaire dans cette mauvaise opinion 🙂
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2 septembre 2015 at 09:09
Ce roman m’intrigue !
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11 septembre 2015 at 20:51
Ayé, il vient de rejoindre ma PAL grâce ou à cause de toi, selon que j’aimerai ou non ma lecture 😉
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11 septembre 2015 at 21:10
Tu me donneras le verdict, alors 😉
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13 septembre 2015 at 20:13
Bah oui, le zogma est passé ce soir
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18 septembre 2015 at 16:35
Oh je n’avais pas vu ce commentaire ! C’était gentil de me prévenir, Le Merydien 🙂
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18 septembre 2015 at 16:21
Je viens d’écouter le Masque, et repéré ton zeugma ! 😉
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